La Table du Rothenbrunnen
Depuis plus de 10 ans, nous donnons notre avis sur les différentes qualités de plus de 70 établissements. Force est de constater que certains font le choix de l’authenticité en valorisant leur propre production ; les autres mettent en avant le repas marcaire, dont la quasi-totalité des constituants est d’origine industrielle. Dorénavant, nous délaisserons ces lieux qui n’offrent que peu d’intérêt !
Une fois n’est pas coutume – Été 2019
Que s’est-il passé le jour où nous avons revisité le Rothenbrunnen qui nous avait séduit par son esprit de clan et l’âme que dégageait, certes avec une certaine retenue, chaque membre de l’équipe. L’accueil est impersonnel ; l’attente, avant même d’être salué, est pesante compte tenu du nombre de convives. Pour choisir le déjeuner, l’échange est curieusement limité : nous apprenons de suite que la quiche aux 3 fromages est épuisée et que pour une entrée à base de produits de la ferme, nous n’avons guère que la charcuterie.
Celle ci nous arrive sur table, toute pimpante. Si le Metwurst et le Lawerwurst ont quelques accents de cette agréable rusticité que l’on attend à 1000m d’altitude, les saucisses et le presskopf sont aussi lisses que ceux que vous choisirez dans votre boucherie de ville. Il est vrai que ce critère n’empêche pas une fabrication à partir des bêtes de la ferme puisque nous nous rappelons que c’est Laurent, boucher au Thillot qui transforme les carcasses. Mais un peu plus de caractère ne nuirait pas au pied du Petit Ballon.
Entre le burger au munster et l’échine de porc-crudités-salade-frites, nous préférons la seconde dans sa version marinée. En réussissant sans problème à faire remplacer les frites par des roïgebrageldas. La viande est tendre, la marinade gouteuse, les roï tels qu’on les attend… Mais enfin, ce jour là, nous nous sommes nourris. Sans erreur technique. Mais aussi, et pour nous, c’est fondamental dans ce type de lieu, sans aucun plaisir. L’épaisseur impressionnante de la couche de crème chantilly sur les tartes nous a conforté dans ce sentiment… Nous n’étions donc pas très dessert ce jour-là ! Où donc était passée l’âme de cette famille ?
Nous ramenons notre appréciation à 2 clarines dans l’attente d’une nouvelle visite plus convaincante.
1ère visite
Le repas.
D‘emblée, Christelle nous suggère les plats à base des produits élaborés à la ferme : fromages de vaches, chèvres, tourtes et entrecôtes…
Devant la variété de l’offre, nous demandons à goûter à l’éventail le plus large.
La charcuterie est belle et excellente. Belle ? on peut s’interroger sur une absence de « rusticité » visuelle et gustative. Cependant les viandes sont transformées par le boucher Laurent au Thillot, que nous avons déjà croisé dans plusieurs ferme-auberges. L’intérêt de ce choix réside dans la synergie de 2 professionnalismes exigeants : le fermier élève ses bêtes avec soin et le boucher tend à sublimer le travail du premier. Et détail non négligeable, l’aubergiste est certain de recevoir les viandes de ses propres bêtes !
Résultat : un saucisson sec goûteux et moelleux, un fromage de tête qui est une réelle gourmandise, un jambon cru onctueux, un lard bien équilibré et fondant jusque dans ses parties maigres, un metwurst de forte personnalité… La tartine de chèvre chaud nous a laissé plus sceptique. Pourquoi l’agrémenter d’herbes de Provence qui dominent l’ensemble et fait disparaître le goût du chèvre alors qu’en Alsace nous disposons d’herbes diverses, variées et plus subtiles.
En saison hivernale, l’Elsasser Grustel séduira ceux qui ne craignent pas les plats plus riches : des pommes de terre cuites en robe des champs, tranchées, avec des lardons frits puis gratinées au bargkaas. Et comme cela peut sembler trop léger, un œuf mollet couronne l’ensemble. Pas très diététique mais oh combien gourmand. Dans un registre voisin, la quiche aux 3 fromages offre une alternative agréable à la traditionnelle « lorraine ». L’entrecôte a du caractère. Elle est rustique et tendre à la fois, bien loin de certaines viandes urbaines, fondante parfois, mais surtout insipides.
Pour les fromages, la palme revient sans équivoque au bargkaas de 4 mois d’affinage, bien équilibré entre puissance et délicatesse.
Côté vins.
Le choix des vins d’Alsace est ouvert. Deux vignerons, le Domaine Michel Fonné à Bennwihr et Joseph Cattin à Voegtlinshoffen et deux Caves, Les Faîtières à Kientzheim et Turckheim pour la cuvée Rothenbrunnen.
Au Sylvaner avec beaucoup trop de sucre résiduel, préférez l’Edelzwicker droit, corpulent, aux furtifs arômes de coing et légèrement fumé, d’une rare complexité pour un Edel. Le pinot blanc est fruité et riche, alliant fraicheur et rondeur
En rouge, le Côte du Rhône basique est dur et vert. Rassurez-vous, le Vieux Clocher reste une valeur sûre pour les vins fruités et mûrs. Il est accompagné de son grand-frère, le Vacqueyras issu des mêmes chais des Frères Arnoux. A noter, un Merlot du Pays d’Oc et les classiques Bordeaux, Beaujolais.
En conclusion.
Même si vivre et travailler ensemble toute l’année ne doit pas être évident tous les jours et connaître quelques épisodes orageux, on ressent la solidarité d’un clan, uni autour d’un même objectif : satisfaire le client. C’est la force d’un esprit de famille qui œuvre en cohérence. Un orchestre dont chaque membre connaît sa partition et l’interprète pour composer une harmonie parfaite.
Le plaisir est assurément au rendez-vous.
Parmi les autres plats possibles :
– Bœuf bourguignon
– Pot au feu
– Fleischnacka
– Baekaoffa
– Rôti de porc, de veaux, de bœufs
– Choucroute
– Bouchée à la reine
– Pain de viande
A emporter :
Charcuteries
Bargkaas
Tomme
Fromages de chèvre