La Table de la Glashütte
Depuis plus de 10 ans, nous donnons notre avis sur les différentes qualités de plus de 70 établissements. Force est de constater que certains font le choix de l’authenticité en valorisant leur propre production ; les autres mettent en avant le repas marcaire, dont la quasi-totalité des constituants est d’origine industrielle. Dorénavant, nous délaisserons ces lieux qui n’offrent que peu d’intérêt !
Le contraste – Printemps 2023
Toute l’équipe est toujours fidèle au poste… Mais comment pourrait-il en être autrement ? Carine et sa maman Marie-Liliane se partagent les rôles en cuisine tandis que tante Danièle officie au service. Dès notre arrivée, on nous annonce avec enthousiasme que Carine reprend officiellement le flambeau à la Glasshütte, mais dans les faits, cela change-t-il quelque chose ? La famille est unie autour du même esprit et avec la même force tranquille : rester fidèle à l’authenticité, la qualité des produits et au plaisir des clients. C’est dans ce dernier point d’ailleurs que réside un paradoxe : nous avons fait remarquer à Carine sa publication régulière sur les réseaux sociaux, proposant chaque dimanche… le repas marcaire ! Elle assume, tout en nous confirmant qu’elle n’y prend aucun plaisir, mais qu’elle répond ainsi à la demande de 50% des clients qui ne viendraient pas chez elle s’ils ne trouvaient pas ce repas. Jusqu’où le consommateur lui-même n’est-il pas à l’origine du déficit d’authenticité de certaines ferme-auberges, qualité que ce même consommateur recherche et réclame par ailleurs ?
Comme chez ma Grand-Mère.
L’idée de tradition peut être interprétée de diverse façon. Il y a la reproduction inchangée et à l’envi d’un héritage du passé. Mais il peut y avoir la volonté de préserver des émotions vécues dans son histoire ou de les faire revivre, tout en s’inscrivant dans un monde contemporain.
Le pot-au-feu que nous allions déguster aujourd’hui illustre parfaite cette deuxième voie. Et l’histoire commence à la base. De quelle race est issue la viande ? Il s’agit du Black Angus que la famille Gully a introduite à la ferme au-dessus de Rimbach depuis quelques années. Il n’est de consommateur avisé qui oserait décrier les qualités gustatives de cette race bovine. Mais, en général, on l’achète pour des pièces comme les entrecôtes, les filets ou les côtes de bœuf… Mais là, il est servi en pot-au-feu. Et le choix des morceaux nous confirme la belle qualité de la bête : le plat-de-côte et la macreuse sont privilégiés à l’habituel paleron ou au jarret plus gélatineux. Dans ce domaine, chacun sa religion et… sa confiance en son boucher.
Toujours est-il que le plat fut dé-li-cieux !
D’abord le bouillon goûteux et savoureux, relevé avec justesse. Son équilibre fait honneur aux parfums de la viande enrichis de sa palette de légumes. Il est inévitablement rehaussé d’herbes et de petits croutons.
La viande qui suit est servie avec un bel assortiment de crudités et pommes grenaille. D’accord, ma Grand-Mère rajoutait les légumes cuits émincés et traités en salade tiède. Je repense avec émotion aux carottes écrasées avec le jaune des œufs durs. Mais dans le contexte d’une ferme-auberge l’exercice est certainement trop chronophage.
Tous les morceaux de viande sont d’une tendreté exemplaire. Et leur saveur est franche, avec un caractère bien affirmé, tout en nuance : un réel velours sur nos palais. Ce plat est d’une rare subtilité et d’une grande richesse aromatique.
Pour l’assaisonner, on nous propose un raifort joliment travaillé : à la fois puissant et pourtant nuancé, avec quelques herbes qui élargit la palette des perception en bouche.
Nous retrouvons le pot-au-feu de notre grand-mère, réunissant authenticité et délicatesse.
Au dessert, nous avons le choix entre une tarte aux myrtilles ou à la rhubarbe. Scandale me direz-vous ! Bien sûr que non ! A la Glashütte, les données sont claires : les myrtilles cueillies par la famille en saison qui ne sont pas utilisées de suite, sont congelées. Pour la rhubarbe, il s’agit des premières tiges de la saison. Nous n’avons pas pu nous empêcher de gouter aux deux… qui étaient simplement délicieuses !
Elles sont vraiment investies, les 3 dames de la Glashütte, pour le plus grand plaisir de leurs clients.
Toujours au service du client – Automne 2020
L’accueil est chaleureux et chaque client, se sent chez lui dès son arrivée. Carine et Marie-Liliane essaient de le bichonner, en mettant tout en œuvre pour qu’il passe un moment agréable. Si la Covid a sérieusement entamé l’activité de la Glashütte, elle n’a pas réussi à entamer ni le moral ni la volonté d’avancer avec opiniâtreté. Des évolutions sont en vue et la famille envisage de reprendre à son compte la ferme-auberge. Son ambition est à la hauteur de sa détermination.
Au niveau du cheptel, les quelques cochons disparaîtront du paysage au profit des bovins : des vaches allaitantes destinées à la production de viande exclusivement, le fromage provenant des collègues du Buchwald.
Parmi les quelques défis, notons l’introduction de Black Angus, cette race écossaise qui fait le bonheur des gastronomes exigeants. Le bœuf de Kobé n’est plus très loin…
Rassurons immédiatement les amoureux du lieu et les habitués de la famille, Carine continue de s’occuper des 15 chevaux, en développant avec enthousiasme la notoriété et l’image de son élevage.
A table.
Faut-il le regretter, bien qu’aucun cochon ne pointe son groin à l’horizon, l’auberge propose (parfois ou souvent ?) le repas marcaire. Ce jour, il fait suite à la commande préalable d’un groupe venu « s’encanailler » en montagne autour d’un plat « exotique ». Comme si le collet fumé ne pouvait pas se préparer chez soi puisque celui de la Glashütte vient aussi du boucher. Bien sûr, il y a la tourte, faite maison, et les fameuses roïgebragelda. Nous espérons simplement que les afficionados de ce repas typé ne soient pas des écolos convaincus qui, en semaine et en plaine, se complaisent dans les plus sévères exigences quant à l’origine des ingrédients ou matières premières.
Nous avons pu gouter à la tourte et au presskopf transformé par Nicolas, le fils de la maison. Réalisé à partir d’une vraie tête de cochon, le presskopf associe la rusticité de la consistance à la finesse des saveurs. Accompagné d’une vinaigrette qui ressemble à la richesse d’une gribiche, ce plat est un pur délice. La tourte se pare aussi d’une personnalité propre : texture idéale, viande épicée, équilibre de goûts, pâte feuilletée croustillante et cuite à la perfection.
A suivre des fleischnackas qui émeuvent encore le palais une semaine plus tard rien qu’à l’évocation de leur souvenir… Dès le premier regard, elles séduisent par les nuances du grillé, confirmé en bouche par le moelleux équilibré de la pâte et de la viande de pot-au-feu. Celle ci fond dans la bouche tout en affirmant un sacré caractère. Les épices et la combinaison d’herbes, sont ajustées parfaitement. Dire que sont les meilleures fleischnackas mangées depuis un moment pourrait paraître excessif et trop partial. Mais nous assumons. Pour finir, la gourmandise des tartes aux quetsches ( locales) ou aux myrtilles (d’Allemagne) font danser les papilles. Sans trop de sucre avec une pointe d’acidité qui développe une fraicheur propice et reposante à la fin d’un repas.
En conclusion.
Nous avons passé un excellent moment à la terrasse de cette auberge surprenante par le barnum installé devant le bâtiment principal et rassurante par la chaleur de l’accueil, l’esprit bon enfant de Liliane et Carine et l’atmosphère d’authenticité dans laquelle nous plongeons avec plaisir. Si nous oublions le marcaire, nous sommes tentés de passer notre appréciation à 4 clarines et à 4 têtes de vaches.
passé un excellent moment à la terrasse de cette auberge surprenante par le barnum installé devant le bâtiment principal et rassurante par la chaleur de l’accueil, l’esprit bon enfant de Liliane et Carine et l’atmosphère d’authenticité dans laquelle nous plongeons avec plaisir. Si nous oublions le marcaire, nous sommes tentés de passer notre appréciation à 4 clarines et à 4 tête de vaches.
1ère visite
Le repas
Point de chichi, le menu du jour est annoncé oralement par Marie-Liliane, et les agapes démarrent… Naturellement, par une soupe de légumes (qui viennent de Ponton à Guebwiller), bien savoureuse composée de céleris, carottes, navets choux et poireaux. L’ensemble lié par des flocons d’avoine qui contribuent au côté onctueux de ce potage. Suit une assiette de charcuterie et crudités.
Si nous avons du mal à comprendre la tomate en octobre, et la tranche en provenance directe d’un « boucher de ville » en revanche, le presskopf maison est un morceau d’anthologie : une matière riche et souple avec un réel goût d’authenticité. Le collet est tendre, juste fumé, tout en délicatesse. Autre pépite : le jambon de sanglier qui sent la noisette et la châtaigne, fumé à la sciure de sapin, agrémenté de coriandre et genièvre. Les deux lard, de jambon et fumé sont trop jeunes et pas assez séchés. Ce qui explique leur consistance un peu élastique, pas très agréable et une saveur qui manque de concentration : à redécouvrir dans quelques semaines.
Le rôti issu du quasi d’un veau de lait de 130kg est préparé en sauce au vin rouge façon civet. La texture de la viande est agréable, particulièrement tendre et fondante. La sauce est peut-être légèrement trop épaissie. Les spaetzles qui accompagnent le plat sont vraiment originaux : leur forme comme leur texture sont au croisement des spaetzles tradititionnels et des nouilles alsaciennes.
Sans dévoiler son secret, Marie-Liliane nous lève un pan du voile : les œufs de ses poules et un rajout de semoule… Globalement, les plats manquent un peu d’assaisonnement, particulièrement de sel. Marie-Liliane en convient et nous explique qu’il est difficile pour elle d’arbitrer, entre son propre goût et la demande de plus en plus pressante des clients qui veulent une cuisine édulcorée, un paradoxe en ferme-auberge : lard sans sel, dessert sans sucre, plat sans épices, civet sans vin… Le fameux bon sens paysan en prend un sacré coup et c’est bien dommage d’être confronté à de tels excès, aussi dommageables dans un sens comme dans l’autre.
Le munster illustre la même singularité : il est moelleux à cœur, d’une texture exemplaire, mais faible en goût à l’instar du siaskaas très nature…
En revanche, la tarte aux quetsches, sent bien la cannelle. Elle est joliment compotée « tatinée » pourrait-on dire, à confondre avec une Linzertorte !
Côté vins
A la Glashütte, le vin est proposé sur une « vraie » carte. Pour les Alsace, le convive a le choix entre 3 vignerons : Jean-Baptiste Adam à Ammerschwihr, la Cave du Vieil-Armand à Soultz-Wuenheim, le Domaine Brucker à Wuenheim. L’ensemble des cépages est bien représenté, que ce soit au verre ou à la bouteille.
Notons la présence des pinots gris et noirs en cuvée des fermiers-aubergiste par la cave du Vieil-Armand. Le registre des vins rouges est bien varié puisqu’on y trouve des Côtes du Rhône avec notamment une Réserve Glashütte , fruitée, souple aux tanins bien fondus, assemblée par Arnoux & Fils à Vacqueyras, auteur de l’omniprésent « Vieux Clocher » et un Chusclan bien gourmand en Côte du Rhône Village. Un Bourgogne passe-tout-grain, 3 Beaujolais dont un Morgon, et en Bordeaux, le Château Frontenac et le Royal St Emilion par l’union des producteurs locale. Sans omettre la cuvée des Boutinelles en rosé par le cellier de Ramatuelle.
En conclusion
Certes la Glashütte est ouverte toute l’année et facilement accessible en voiture. Pour autant, elle n’a pas perdu son âme. En semaine et hors saison, en dehors des repas, elle fait office de « bistrot de village » où les habitués se rencontrent juste autour d’un verre, pour prendre un café et passer un bon moment en discutant avec Marie-Liliane. Cet esprit signe aussi la cuisine : ancrée dans son époque, authentique et bon enfant à la fois. La recherche de qualité y est sincère et on s’en donne les moyens.
La réalité économique n’en n’est pas moins prise en compte pour autant. Toute la famille aime ce lieu et travaille à sa pérennité en la fondant sur le bien-être et la satisfaction de ses clients.
Parmi les autres plats possibles :
– Repas marcaire sur commande
– Bouchées à la reine avec quenelles maison
– Rôtis de bœuf, veau ou porc
– Lapin aux nouilles
– Pot-au-feu
– Salade de viande
– Poitrine de veau farcie
– Tourtes
– Presskopf vinaigrette
– Gibier en saison et sur demande
– Méchoui sur commande
A emporter :
– les produits de la ferme sont tous destinés à la table de l’auberge