La Table du Schantzwasen
Depuis plus de 10 ans, nous donnons notre avis sur les différentes qualités de plus de 70 établissements. Force est de constater que certains font le choix de l’authenticité en valorisant leur propre production ; les autres mettent en avant le repas marcaire, dont la quasi-totalité des constituants est d’origine industrielle. Dorénavant, nous délaisserons ces lieux qui n’offrent que peu d’intérêt !
Une belle cuisine dans un cadre très joliment rénové – Printemps 2017
Lors d’une précédente visite, nous évoquions : « Une auberge de montagne menée par une famille, une équipe honnête et engagée. La recherche de la qualité est omniprésente. Tous les choix y sont réfléchis et assumés avec conviction ». Aujourd’hui, nous n’avons strictement rien à retirer à cette affirmation. L’accueil des parents, Thierry Hininger et son épouse Marlène est aussi sympathique qu’efficace. Et le nouveau décor rajoute un raffinement complémentaire à l’ambiance déjà naturellement agréable. L’identité montagnarde de l’auberge est renforcée par le choix du bois omniprésent, du « vrai bois d’arbre » qui signe la volonté d’authenticité des hôtes. Et, soucis du détail, des nappes en papier kraft habillent le dessus des tables avec élégance et cohérence.
Bien sûr, la carte est (trop ?) vaste et contraste logiquement avec l’offre d’une ferme-auberge classique. Mais ici, nous sommes bel et bien dans une auberge de montagne, sans ferme, mais… avec un élevage de rennes qu’il est possible visiter depuis 2006. La volonté de transparence et de clarté pour le client se retrouve en première page du menu qui énonce la liste des fournisseurs de l’auberge. Le client connaît dès lors la provenance de chaque produit.
Pour accompagner l’apéritif, la planchette de charcuterie donne le ton. Le jambon de cerf, tendre et bien parfumé, a remplacé celui de renne, difficile à suivre par les temps troubles de la pandémie. Le saucisson de porc maison délicatement épicé et le magret de canard nous ravissent par leur onctuosité, sans que le gras n’envahisse nos papilles.
A suivre une tête de veau savoureuse, et cuisinée avec justesse et précision.
Sa présentation est soignée, au diapason de l’élégance de la salle. Elle est servie en petite cocote Staub, accompagnée d’une belle salade, disposées sur une ardoise, avec une mayonnaise et des câpres que les clients peuvent rajouter selon leur goût.
Pour la gratinée au munster et bargkaas, des roïgebrageldas coiffés, le raffinement contraste avec la rusticité originelle de ce plat. Bien présentes, les saveurs nous impressionnent par leur équilibre subtil.
On ressent la recherche de la perfection à tous les niveaux. Et si les prix ont certes évolué, ils restent très raisonnables par rapport au contexte et à la superbe qualité des plats.
C’est avec plaisir que nous maintenons les 4 clarines.
Le repas.
La carte est pléthorique et nous nous sommes concentrés sur les suggestions du jour. Impossible, bien sûr, de passer à côté de la charcuterie de rennes. La viande est achetée en direct en Laponie car l’élevage est trop récent et trop petit pour permettre un abattage régulier. Cependant elle est complètement transformée et apprêtée à l’auberge. Disons-le sans réserve : les produits sont excellents.
Le jambon fumé de renne sur planchette, est délicat et tendre, avec cette suavité propre au gibier. Le saucisson, d’une couleur intense, ravit le palais par son caractère affirmé, épicé avec justesse, juste moelleux comme il faut.
A suivre, une interprétation toute personnelle d’un plat traditionnel par excellence : les quenelles de foie ou lawerknepflas. Ce sont en effet des quenelles, mais très petites, réalisées dans une taille qui se rapproche des quenelles de pâte ou « Spaetzle ». Elles sont poêlées avec de l’oignon émincé et une belle quantité de lardons, ce qui confère un goût original à ce plat de terroir. On y retrouve la nostalgie gustative, avec ce petit rien qui casse la tradition. De plus elles sont accompagnées de Roïgebrageldas d’une rare élégance !
La bouchée à la reine est du même tonneau. Si la tradition est respectée, comme il se doit sur un tel plat, la rusticité cède la place à la finesse. Le veau est tendre, la sauce harmonieuse avec ses petites carottes émincées, même si on pourrait s’attendre un peu plus de caractère. De plus, Guillaume ne faisant pas non plus comme tout le monde propose une croûte (faite maison) de forme carrée. La justesse des cuissons s’étend jusqu’aux nouilles qui sont al dente, fait suffisamment rare pour qu’il soit souligné ici.
Viennent ensuite les fromages. Le munster de la ferme Burger de Soultzeren est équilibré, presque fondant avec des saveurs délicates, un peu retenues. Ce sera un délice dans une bonne semaine… s’il en reste. A l’inverse, la cuvée en cours du Bargkaas de la ferme Oberlé de Stosswihr nous laisse sur notre faim.
En conclusion, nous vous soumettons une question de géométrie gastronomique : quelle est l’épaisseur idéale du meringage sur une tarte à la rhubarbe ? Sans doute y a-t-il autant de réponses que de convives. EGuillaume, Marie-Odile et Thierry,n tous cas, ici la tarte est excellente.
Côté vins.
Les vins d’Alsace proviennent de la Cave de Turkheim. Ils accompagnent agréablement les plats du restaurant, sans pour autant nous procurer d’émotion particulière. La carte des vins rouges est inversement proportionnelle à la diversité des mets. Nous vous en recommandons l’un d’eux, sorte de « cuvée du patron » est une IGP du Pays du Gard. Elle est veloutée, gourmande et de bonne facture. L’assortiment est complété par les classiques Côtes du Rhône, Beaujolais, Bordeaux…. Un petit effort serait bienvenu pour hisser les flacons à la hauteur de l’assiette !
En conclusion.
Une auberge de montagne menée par une famille, une équipe honnête et engagée. La recherche la qualité est omniprésente. Tous les choix y sont réfléchis et assumés avec conviction. Le rapport qualité/prix est excellent. La cuisine est sans nul doute généreuse et le soin apporté au dressage des assiettes est un régal pour l’œil. L’atmosphère bienveillante, nous met à l’aise : on s’y sent bien. Et le randonneur peut y côtoyer le visiteur de passage sans aucune gêne.
Parmi les autres plats possibles, voir le site